Les Coups de pouce privilégient la rénovation globale
Le Gouvernement a décidé de supprimer certaines offres Coups de pouce. Il souhaite privilégier les rénovations globales plus efficaces. Mais ces chantiers peinent à décoller. Une étude menée par Enea identifie les obstacles et émet des recommandations pour accélérer le rythme de ces opérations.
Le 16 avril dernier, l’arrêtéArrêté du 13 avril 2021 modifiant l’arrêté du 22 décembre 2014 définissant les opérations standardisées d’économies d’énergie et l’arrêté du 29 décembre 2014 relatif aux modalités d’application du dispositif des certificats d’économies d’énergie qui entérine un certain nombre d’évolutions des offres Coups de pouce CEE a été publié. Le change ment le plus important porte sur la suppression des offres à 1 euro, qui permettaient aux particuliers de réaliser des travaux d’isolation de combles, de planchers bas, ou de remplacer des chaudières par des appareils gaz très performants. Le Coup de pouce isolation des combles sera maintenu pour les travaux engagés avant le 30 juin 2022 et prolongés jusqu’au 30 septembre 2022. Mais les bonifications ont été réduites de moitié depuis le 1er juillet, ce qui enterre définitivement les offres à 1 euro. Les primes CEE pour remplacer des chauffages au fioul et au gaz par des équipements récents utilisant la biomasse ou des pompes à chaleur seront maintenues jusqu’en 2025. Selon le gouvernement, ces offres sont supprimées pour lutter contre les effets d’aubaine voire les fraudes à la rénovation énergétique. « Cela ne change en rien les orientations fondamentales prises pour des aides plus efficaces et plus justes, et notamment la fin de l’isolation à 1 € en raison des dérives que celle-ci a pu générer. La transition que nous conduisons se doit d’être pragmatique pour tous, pour les artisans et les entreprises comme pour les ménages », a affirmé la ministre du Logement Emmanuelle Wargon.
Rénovation globale
Et par aides plus efficaces et plus justes, le Gouvernement entend encourager les rénovations globales. Un Coup de pouce, baptisé « Rénovation performante d’une maison individuelle » est dédié à ces opérations depuis octobre 2020. Il s’appuie sur deux fiches d’opérations standardiséesBAR-TH-164 (Rénovation globale d’une maison individuelle) et BAR-TH-145 (Rénovation globale d’un bâtiment résidentiel) et doit permettre de réduire le nombre de passoires thermiques et d’accélérer l’abandon des énergies fossiles. En effet, la rénovation globale conduit à des économies d’énergie bien plus importantes que les opérations lot par lot : un bâtiment rénové en trois ou quatre étapes consomme en moyenne 30 % plus qu’un bâtiment rénové en une fois. Malgré ces points forts, la rénovation globale peine à prendre son essor.
La rénovation globale stagne
Le rythme des rénovations globales sur la période 2012-2018 s’est élevé à 70000 par an. Très loin des objectifs de la stratégie nationale bas-carbone (SNBC) qui fixe le nombre de chantiers à 370 000 par an dès l’année prochaine. Ce manque d’engouement autour de ces opérations s’explique par plusieurs facteurs. Du côté de l’offre, d’abord, les obligés et les délégataires sont moins engagés sur la rénovation globale : 26 d’entre eux avaient signé la charte coup de pouce associée au 20 juillet 2021 alors qu’ils étaient 72 à avoir paraphé celle consacrée au chauffage PAC air/eau et eau/eau. Sur le terrain, le nombre d’entreprises certifiées Reconnu garant de l’environnement (RGE) offre globale reste limité : à peine 316 le sont sur un total de presque 70000. Et ces chantiers ne sont pas qu’ils maitrisent, au détriment des mécanismes de soutien (dispositif simples à mener à bien. « Il faut d’abord faire des diagnostics énergétiques en amont puis coordonner les travaux et c’est parfois compliqué car il faut faire travailler ensemble des artisans issus de spécialités très différentes », explique Marc Gendron, délégué général du Club C2E.
Aides non harmonisées
En outre, l’offre de rénovation globale varie selon les territoires, en partie car les aides supplémentaires versées par les collectivités ne sont pas uniformes. Cela donne des restes à charge faibles dans les territoires très engagés, mais beaucoup plus importants ailleurs. Le reste à charge est d’ailleurs une des explications qui freine la demande. Concrètement, les primes CEE bonifications proposées dans le cadre des Coups de pouce « Rénovation performante » ont des montants souvent inférieurs à ceux des dis positifs lot par lot. Un problème renforcé par un manque d’implication des banques qui sont souvent changements peu engagées dans la distribution d’éco-prêts à taux zéro car ils sont peu rentables. Dans ce contexte, les acteurs des CEE préfèrent rester sur des modèles de rénovation unitaire qu’ils maitrisent, au détriment des rénovations globales, d’autant plus que le dispositif est peu lisible et que l’accès aux aides est compliqué, avec des délais d’obtention longs.
Dynamiser la filière
À la demande du club C2E, Enea Consulting a réalisé une étudeÉtude sur la rénovation globale dans les bâtiments résidentiels : une synthèse sera présentée lors des Journées techniques CEE qui se dérouleront du 1er au 2 décembre dans laquelle elle propose un certain nombre de pistes pour lancer plus massivement les rénovations globales. Certains leviers pourraient être actionnés dès aujourd’hui. Elle suggère de mettre en place une structure d’offre qui intègre un maximum de solutions essentielles à la simplification et la rationalisation des opérations, des audits à la réalisation coordonnée des travaux, en passant par les solutions de financement. Ensuite, l’étude propose de cibler les chantiers prioritaires, mais aussi d’uniformiser et de renforcer la communication auprès des maîtres d’ouvrage. Néanmoins, des changements devront être opérés dans le dispositif. L’étude préconise notamment de supprimer certaines contraintes techniques et organisationnelles. Elle estime aussi qu’il est impératif d’orienter clairement les mécanismes de soutien (dispositif CEE, aides Anah) vers la rénovation globale au détriment du lot par lot. Pour sécuriser les acteurs, l’étude souhaiterait mettre en place des garanties pour pallier aux éventuels risques opérationnels et stabiliser les dispositifs sur le long terme pour donner de la visibilité à la filière. En outre, elle considère qu’il faudrait mettre en œuvre des formations sur la rénovation globale pour faire monter en compétences la filière. Enfin, elle insiste sur l’importance de simplifier les démarches des professionnels en fluidifiant les procédures administratives.