Le charbon au secours du système électrique ?

31 01 2022
Olivier Mary
Francois-AdobeStock

Pour pallier la faible disponibilité du parc nucléaire cet hiver, l’État étudie plusieurs options. Un projet de décret notamment vise à augmenter le plafond d’émission de gaz à effet de serre des installations de production d’électricité à partir de combustibles fossiles. Par conséquent, les deux dernières centrales à charbon françaises pourraient bien tourner à plein régime pendant deux mois.

La disponibilité du parc nucléaire français n’a jamais été aussi basse à cette période de l’année. Elle est évaluée par RTE entre 43 GW et 51 GW pour le mois de janvier. La crise sanitaire a empêché l’entretien normal de plusieurs installations. Cela a abouti à la mise en pause imprévue des deux réacteurs de Chooz pour des vérifications liées à la sûreté et par la prolongation de l’arrêt des deux réacteurs de Civaux pour la même raison. En tout, douze sont au point mort. Le gestionnaire de réseau a donc placé cet hiver sous vigilance. En cas de températures de 4°C en dessous des normales ou de situation de très faible production éolienne en Europe, RTE envisage des coupures ponctuelles pour les grands consommateurs industriels, la baisse de la tension sur les réseaux, voir des coupures ciblées de consommateurs. Pour éviter d’avoir recours à ces méthodes, le Gouvernement envisage de se tourner vers le charbon.

Mille heures de fonctionnement en deux mois

L’article 12 de la loi énergie-climat de 2019 prévoit que l’administration fixe par décret, dès le 1er janvier 2022, un plafond d’émissions applicable aux installations de production d’électricité à partir de combustibles fossiles qui rejettent plus de 0,55 tonne de dioxyde de carbone par mégawattheure. Ce seuil annuel a été fixé à 0,7 kilotonne, ce qui correspond à environ 700 heures de fonctionnement pour une centrale thermique à charbon en un an. Ce faible temps de fonctionnement qui dégrade la rentabilité de ces installations a déjà entrainé la fermeture de deux des quatre dernières encore présentes en France métropolitaine. Mais compte tenu des tensions attendues cet hiver sur le réseau électrique, le ministère de la Transition écologique envisage de publier un nouveau décret pour élever ce seuil.

Il pourrait donc passer à 1 kt/MW de puissance électrique installée jusqu’au 28 février prochain, ce qui correspond à 1 000 heures de fonctionnement durant cette période pour les centrales de Cordemais (Loire-Atlantique) et de Saint-Avold (Moselle). Cette dernière a dû commander et faire acheminer en urgence 90 000 tonnes de charbon sur son site. Par la suite, le plafond sera abaissé à 0,6 kt jusqu’à la fi n de l’année. Enfin, en 2023, il devrait repasser à 0,7 kt. Cela ne change pas pour autant le calendrier de fermeture de ces installations : celle de Saint-Avold devrait être stoppée définitivement le 31 mars pour accueillir une chaufferie biomasse au profit de l’industrie chimique. Des projets de production d’hydrogène sont également étudiés. Cordemais produira de l’électricité jusqu’en 2024 sans projet de reconversion solide après l’abandon par EDF du projet Ecocombust, qui prévoyait de la remplacer par une centrale biomasse.

En pleine période électorale, la relance du charbon a entrainé des réactions vives. Sur France Info, Valérie Pécresse en a profité pour défendre le nucléaire. « [Emmanuel Macron] a fermé la centrale nucléaire de Fessenheim et aujourd’hui il rouvre les centrales à charbon. Il a fait passer la France du XXIe siècle au XIXe siècle en un mandat », a estimé la candidate des Républicains. Mais elle a oublié de préciser que la centrale alsacienne, avec ses deux réacteurs, n’aurait en aucun cas pallié l’arrêt de douze autres. Cet épisode est emblématique des problèmes qui pourraient secouer le réseau français à l’avenir. Le parc nucléaire vieillit et les arrêts pourraient se multiplier. En 2024, il n’y aura plus aucune centrale à charbon pour compenser. Il faudra alors compter sur l’EPR de Flamanville, qui devait être mis en service dès 2012. Il le sera finalement au second trimestrev2023, après un énième report annoncé par EDF le 12 janvier.

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