Les biodéchets boostent la méthanisation
Afin d’anticiper et d’accompagner la loi antigaspillage pour une économie circulaire qui rend obligatoire le tri des biodéchets pour tous dès le 1er janvier 2024, la filière de production de gaz vert se structure en Île-de-France.
Fin juin dernier, Pascal Mousset, président du Groupement national des indépendants de l’hôtellerie et de la restauration (GNI-HCR) ; Véronique Bel, directrice adjointe clients territoires en Île-de-France (IDF) GRDF ; et Stéphan Martinez ancien restaurateur, fondateur de l’entreprise Moulinot Compost et gaz ont présenté la filière biodéchets en IDF et ses objectifs à l’horizon 2025. Actuellement, pour un gisement annuel de 500 000 tonnes de biodéchets estimées, seulement 40 000 tonnes sont collectées et traitées, soit 13 %. L’objectif est de valoriser 200 000 t de biodéchets à l’horizon 2025 en augmentant les capacités des méthaniseurs ; 18 d’entre eux situés en petite et grande couronne traiteront ce volume. Le biogaz produit sera réinjecté dans le réseau GRDF tandis que les agriculteurs alentour bénéficieront des digestats pour épandre sur leurs sols.
La loi énergie-climat impose 10 % de gaz vert en France en 2030, mais GRDF a des ambitions plus fortes : « C’est tout l’enjeu de la structuration de la filière. La part des gaz verts dépassera les 10 % en 2030 et nous espérons atteindre 100 % en 2050 », souligne Véronique Bel. Le distributeur prévoit d’investir 30 millions d’euros dans le développement et le renforcement du réseau de gaz francilien.
Du biodéchet au GNV
Le biométhane, ce gaz vert principalement utilisé dans les transports en commun, contribue largement à rendre nos centres urbains « propres ». GRDF, Île-de- France Mobilités et la Métropole du Grand Paris travaillent de concert pour développer un maillage efficace des stations d’avitaillement. Actuellement, plus d’une centaine sont en service (28 sont publiques) et 15 nouvelles stations sont en projet. IDF Mobilités prévoit de multiplier par dix le nombre de bus roulant au GNV, passant de 700 à 7 000 bus en 2025, ce qui représentera 75 % du réseau francilien.
Tri obligatoire
Grâce à sa densité de population, la région IDF est un excellent réservoir de biodéchets. Dès 2022, leur tri sera obligatoire pour tous : les restaurateurs et les particuliers (voir Énergie Plus n° 660). Dans le secteur de la valorisation de ces biodéchets, il reste tout à faire, le marché en est à ses balbutiements. Stéphan Martinez, ancien restaurateur et fondateur de Moulinot Compost et Biogaz l’a bien compris. Ce pionnier a commencé par installer un lombricomposteur et un digesteur dans les caves de son restaurant en 2007. Après avoir créé son entreprise de collecte et valorisation, il ouvre actuellement un deuxième site à côté d’une station de méthanisation et d’une station de GNV. L’entreprise Moulinot collecte aujourd’hui les déchets verts de 1 500 restaurants dans la région, dont 25% de restaurants scolaires, et prévoit d’étendre son activité à d’autres métropoles. La collecte des biodéchets a certes un coût mais comme le restaurateur réduit par là même son volume de déchets, il s’y retrouve financièrement. « Le tri est très facile à mettre en place et se fait naturellement, par prise de conscience. Les brigades ne sont pas hostiles à ce travail, au contraire, elles se sentent valorisées car cet effort donne du sens », témoigne Guillaume Gomez, président de GNI-HCR et également ancien chef de l’Élysée.
Les professionnels de la restauration, qu’elle soit rapide, collective ou gastronomique sont prêts à franchir ce cap, mais concernant les ménages, seuls 2 % du gisement de biodéchets est actuellement mobilisé. Deux sites expérimentaux de collecte et traitement des déchets verts des particuliers sont installés en IDF. L’un à Romainville en Seine-Saint- Denis et l’autre à Viroflay dans les Yvelines. Sur les marchés parisiens, des points d’apport volontaires ont été mis en place et des bénévoles fournissent des bacs de compost de biodéchets. Sans nul doute, lorsque des bacs collectifs verront le jour, les Franciliens mettront la main au tri. « Il y a ceux qui refusent le tri, mais ceux qui l’acceptent le font sans concession et parfaitement bien », concède Stéphan Martinez.