Un fabricant de foie gras met ses consommations d’énergie à la diète

Ernest Soulard amaigrit le bilan énergétique de sa production de foie gras et de confit de canard. Le nouveau site industriel “La Cuisine de Constance” mis en service par l’entreprise ligérienne en novembre dernier aux Essarts-en-Bocage (Vendée) a mobilisé en ce sens un investissement de 3,1 millions d’euros dont 2,5 millions ont été couverts par le dispositif de certificats d’économies d’énergie (CEE). Un engagement volontariste au travers duquel l’entreprise familiale de 300 salariés (100 millions d’euros de chiffre d’affaires) fait rimer excellence et réduction de l’impact carbone des produits qu’elle commercialise à 46 % auprès des grossistes et restaurateurs, 38 % de la grande distribution, 13 % des industriels et 3 % des particuliers.
« Ernest Soulard est attentif à la mise en œuvre de modes de production responsables depuis la création de l’entreprise en 1936 par mon grand-père. Aujourd’hui, cette attention est devenue une nécessité impérieuse pour la pérennité de nos activités. C’est pourquoi, dans la perspective de construire un nouveau site industriel, nous avons recherché un partenaire fiable, capable de nous accompagner dans la mise en place d’une installation de froid à haute performance », éclaire Magali Panau-Soulard, la directrice générale d’Ernest Soulard.
Le choix de l’industriel vendéen s’est porté sur l’offre clé en main de CertiNergy & Solutions (groupe Engie). « Nous avons conçu le projet, installé les équipements et suivi le chantier jusqu’à sa mise en service. Nous avons parallèlement recherché la meilleure optimisation financière possible en nous appuyant sur nos douze années d’expérience dans la mise en œuvre du dispositif de CEE », indique Pierre Faure, ingénieur commercial chez CertiNergy & Solutions.

Fluide frigorigène naturel

Le cœur du projet réside dans l’installation d’une centrale de production frigorifique de 2 MW utilisant l’ammoniac, « un fluide frigorigène naturel bénéficiant d’un taux de réchauffement climatique GWP (Global Warming Potential) nul, c’est-à-dire ayant un impact identique au CO2, alors que les fluides utilisés précédemment apparaissent environ 5 000 fois plus impactant que le CO2 en cas de fuite », poursuit l’ingénieur commercial de CertiNergy & Solutions.
La mise en œuvre en parallèle d’un système de récupération de chaleur sur cette nouvelle centrale froid, mais également sur l’air comprimé permet d’alimenter en chaleur le système de dégivrage du site, ainsi que la production d’eau chaude sanitaire. L’économie se chiffre à 4 500 euros par an d’électricité pour le dégivrage et à 9 000 euros par an de gaz pour la production d’eau chaude sanitaire. L’horizon définit par les deux partenaires – réaliser 23 500 euros d’économies par an sur la facture énergétique – ne serait pas atteignable sans la mise en œuvre de solutions digitales. Tout d’abord, une régulation intelligente de la chaine de froid optimise en temps réel l’activité du groupe frigorifique. Elle devrait permettre d’abaisser de 12 % la consommation d’électricité nécessaire à la production de froid. Par ailleurs, un outil de supervision énergétique organise un pilotage fin des installations industrielles : mesure en continue des consommation, suivi des indicateurs de performance énergétique et identification des éventuelles causes des baisses de performance.

Deux sites industriels en un

Le projet est encadré par un contrat de performance énergétique sur une période de cinq ans, avec un engagement de la filiale d’Engie à rembourser les deux-tiers des économies d’énergie non-atteintes. Il devrait se traduire par une économie annuelle de 10 % pour les consommations d’eau et d’électricité de 74 tonnes de CO2. « Je salue la volonté d’Ernest Soulard de privilégier une solution d’avenir pour ses besoins en froid, plutôt qu’une solution moins onéreuse, mais moins performante. En effet, les dépenses d’investissement des industriels sont malheureusement souvent guidées par une vision de rentabilité à court terme. Le dispositif CEE nous permet de passer de solutions standards à des solutions intermédiaires, voire optimales, plus onéreuses », pointe Pierre Faure.

Démarche globale

L’optimisation des consommations énergétiques du site La Cuisine de Constance s’inscrit dans une démarche plus globale de l’entreprise familiale. En effet, l’industriel a transféré aux Essarts-en-Bocage, les activités de ses sites de Caylus (Tarn-et-Garonne) et de Saint-Paulen- Pareds (Vendée) dédiés respectivement aux confits de canard et aux foies gras cuits, La directrice générale d’Ernest Soulard détaille cette démarche d’optimisation industrielle : « Nous cherchions à moderniser notre site de production de foie gras, tout en gardant notre savoir-faire traditionnel mais également à regrouper nos activités. En effet, le transport de viandes de canard jusque dans le Tarn en vue de leur transformation en confits, nous apparaissait de moins en moins cohérent sur le plan environnemental. La cession des Volailles Doux il y a deux ans, nous a donné l’opportunité d’acquérir un site à 200 mètres de notre usine actuelle. »

Coproduits et lisiers valorisés en biogaz
Le souci de limiter son bilan carbone s’inscrit dans une attention d’Ernest Soulard à l’économie circulaire que la troisième génération de dirigeants familiaux, représentée par Magali Panau-Soulard, entend perpétuer. L’entreprise a en effet développé une filière locale et intégrée. L’industriel s’approvisionne auprès de 250 éleveurs implantés dans un rayon de 80 km autour de son site de production. Au sein de son unité de production d’alimentation animale, elle récupère la chaleur des presses. Par ailleurs, les coproduits issus de la production et les lisiers des élevages sont valorisés dans une unité de méthanisation. L’unité baptisée “Bioloie” a été mise en service il y a quatre ans aux Essarts-en-Bocage. Elle a été bâtie par Ernest Soulard en partenariat avec Fonroche Biogaz. La quantité de biogaz injectée chaque année dans le réseau de GRTgaz est équivalente à la consommation énergétique d’une ville de 13 500 habitants.