Nouveau rapport du Giec : S’adapter pour éviter le pire

Le Giec vient de publier son rapport sur les impacts du changement climatique et l’adaptation à ses conséquences. Il détaille les risques sur les écosystèmes et les sociétés humaines. Sans surprise, il est bien plus alarmiste que la précédente édition publiée en 2014 lors du cinquième cycle d’évaluation.
« Le changement climatique constitue une menace pour le bien-être de l’homme et la santé de la planète. […] Tout nouveau retard dans la mise en oeuvre d’une action préventive concertée et mondiale en matière d’adaptation et d’atténuation nous fera rater une fenêtre d’opportunités brève, se refermant rapidement et permettant de sécuriser un avenir vivable et durable pour tous », prévient le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (Giec) dans le rapport rédigé par le groupe de travail II du sixième cycle d’évaluation (AR6). Publié le 28 février, ce rapport détaille les impacts du changement climatique sur les écosystèmes et les sociétés et évoquent des stratégies pour s’y adapter.
Plus de 34 000 articles scientifiques ont été compilés par 270 auteurs pour parvenir à ces conclusions. Si elles résonnent avec celles du précédent cycle d’évaluation, elles alertent sur le fait que les effets du réchauffement sont désormais généralisés et souvent irréversibles. Ils causent déjà des victimes et des morts partout dans le monde. Les épisodes météorologiques de plus en plus extrêmes et fréquents sont maintenant attribués sans hésitation au changement climatique.
Des conséquences sur la santé humaine
Le monde sera confronté à de multiples aléas climatiques au cours des deux prochaines décennies même s’il est sur une trajectoire de réchauffement modérée de 1,5°C. Le globe sera donc touché par des épisodes de chaleurs extrêmes, de fortes précipitations, des cyclones tropicaux S’adapter pour éviter le pire Le Giec vient de publier son rapport sur les impacts du changement climatique et l’adaptation à ses conséquences. Il détaille les risques sur les écosystèmes et les sociétés humaines.
Sans surprise, il est bien plus alarmiste que la précédente édition publiée en 2014 lors du cinquième cycle d’évaluation. plus dangereux, des sécheresses et des incendies plus intenses et plus fréquents. Partout, il y aura une augmentation significative des problèmes de santé, de décès prématurés, à cause des catastrophes climatiques, et de la propagation accrue des maladies. La question de la santé mentale, comme l’anxiété et le stress, devrait également prendre de l’importance, en particulier chez les plus jeunes, les personnes âgées et les plus fragiles.
Ces problèmes pourraient être couplés à des tensions sur les ressources alimentaires. Si la hausse globale des températures s’avère supérieure à 1,5°C, le risque de pertes sur les cultures dans différentes grandes régions augmentera, menaçant les chaînes d’approvisionnement mondiales. Si le réchauffement dépasse 2°C, il ne sera plus possible de faire pousser certaines cultures de base dans de nombreuses régions, notamment tropicales, sans des mesures d’adaptation pour l’instant inconnues.
Un phénomène aggravé par la prolifération de parasites et de maladies qui pourraient se répandre plus facilement chez les végétaux. Les experts du Giec craignent donc un développement de phénomènes de malnutrition. Les régions les plus touchées devraient être l’Afrique subsaharienne, l’Asie du Sud, l’Amérique latine et les petites îles.
Des écosystèmes bouleversés

La ressource en eau sera aussi soumise à une pression accrue. Les habitants des petites îles et des régions qui dépendent des glaciers et de la fonte des neiges manqueront d’eau douce si le réchauffement se poursuit au-delà de 1,5°C. Moins d’eau douce donc, mais plus d’eau salée : l’élévation du niveau de la mer rognera les côtes et détruira leurs écosystèmes. La salinisation des nappes phréatiques et les épisodes de submersion marine amplifieront les difficultés d’approvisionnement en eau et rendront ces zones impropres à l’agriculture.
Cependant, les espaces côtiers ne seront pas les seuls à être durement impactés par le changement climatique. Si les températures croissent au-delà du seuil des 1,5°C, des écosystèmes entiers seront irréversiblement perdus, en particulier dans les pôles et les régions de montagnes touchés par la fonte des glaces. Certains biotopes peinent déjà à s’adapter aux contraintes actuelles, non seulement dans ces zones froides, mais aussi autour des récifs coralliens. Une mortalité massive d’arbres, de coraux et d’autres espèces est attendue.
Outre des effets directs sur les sociétés humaines, la biodiversité sera fatalement touchée. À plus 1,5°C, de 3 à 14 % des espèces terrestres seront exposées à un risque très élevé d’extinction. Si le réchauffement atteint 3°C, il faudra multiplier ces chiffres par dix. Pour limiter ce phénomène au maximum, le Giec préconise de protéger 30 à 50 % des terres, espaces d’eaux douces et des océans de la planète.
Bien gérer l’adaptation
Comme les effets délétères du changement climatique ne pourront pas tous être évités, l’adaptation sera indispensable pour réduire les risques qui y sont associés. Les mesures d’adaptation évoquées par le rapport du Giec sont très diverses. Pour lutter contre la montée des eaux et les inondations, les experts recommandent de généraliser les systèmes d’alerte précoce et la construction de systèmes pour stocker l’eau ou de digues.
Toutefois, sur les digues, ils alertent sur des effets néfastes potentiels. En effet, si elles protègent les personnes et les biens à court terme, elles peuvent aussi inciter à construire dans des zones potentiellement dangereuses et augmenter l’exposition aux risques des populations à long terme. En outre, elles peuvent avoir des effets néfastes sur les écosystèmes. Les scientifiques mettent en garde contre ces solutions, qui, mal utilisées, créeront autant de problèmes qu’elles en régleront.
Pour rendre l’agriculture plus résiliente, le Giec suggère d’avoir recours à l’agroforesterie, de diversifier les plantations et de développer l’agriculture en ville. Pour protéger les forêts plantées, les scientifiques préconisent de les gérer de façon durable, de diversifier les essences et de mieux anticiper les menaces accrues liées aux ravageurs, aux maladies et aux incendies. Quant aux forêts naturelles, elles devront être conservées, protégées et restaurées lorsqu’elles sont dégradées. Le Giec insiste sur la nécessité d’y associer les communautés locales et les peuples autochtones. La reconnaissance de leurs droits se révèlera indispensable à une adaptation forestière réussie.
Un manque de fonds
Néanmoins, les scientifiques insistent sur le fait que toutes ces mesures d’adaptation ne dispensent pas de diminuer les émissions de gaz à effet de serre (GES). En effet, plus les émissions seront réduites lentement, plus les pertes et les dommages se renforceront et rendront l’adaptation difficile, voire impossible. Déjà, les mesures d’adaptation sont insuffisantes. Elles restent souvent limitées dans l’espace et sont calibrées pour répondre aux impacts actuels et aux risques à court terme.
Il sera donc nécessaire de les étendre et de les renforcer pour anticiper leurs effets futurs. Mais pour y parvenir, il faudra débloquer des fonds supplémentaires. Les experts notent, en effet, un manque criant d’investissements en la matière. « Bien que le financement climatique mondial ait montré une tendance à la hausse depuis le cinquième cycle d’évaluation, les flux financiers actuels pour l’adaptation, qu’ils proviennent de sources publiques ou privées, sont insuffisants et limitent la mise en oeuvre des options d’adaptation, en particulier dans les pays en développement », pointent les scientifiques.
Les pays riches avaient notamment promis de fournir 100 milliards de dollars par an aux pays en développement d’ici 2020 pour réduire les émissions et pour s’adapter au changement climatique. Mais ce fameux fonds vert peine toujours à se concrétiser et cela depuis des années (voir Énergie Plus n°675). Toutefois, il progresse peu à peu et un accord ambitieux a été entériné lors de la Conférence des Parties (COP) qui a eu lieu à Glasgow en novembre dernier. Les pays développés devront doubler leurs fonds pour l’adaptation dès 2025. Encore faudrait-il que les signataires respectent leurs engagements.