Les armées anticipent le changement climatique
L’Institut de relations internationales et stratégiques (Iris) vient de publier un rapport pour le compte de la Direction générale des relations internationales et de la stratégie du ministère des Armées. Il analyse les attitudes des forces armées étrangères face aux enjeux climatiques et environnementaux.
Les conséquences du changement climatique concernent tout le monde. Y compris les forces armées. En effet, les infrastructures militaires seront, comme toutes les constructions humaines, affectées par l’augmentation des températures et ses conséquences. Les États-majors seront aussi très vite confrontés à des missions complémentaires destinées à protéger les populations des effets des catastrophes naturelles. Leurs activités traditionnelles seront, elles aussi, bouleversées par le climat qui rendra certains théâtres d’opération comme les déserts chauds, encore plus extrêmes. Il est donc crucial d’adapter l’appareil militaire à ces évolutions dès aujourd’hui. À la demande de la Direction générale des relations internationales et de la stratégie (DGRIS) du ministère des Armées, l’Institut de relations internationales et stratégiques (Iris) a dressé dans un rapport* un panorama non exhaustif de l’intégration et de l’appropriation des enjeux climato-environnementaux par les forces armées étrangères.
S’adapter et réduire ses impacts
Les armées des pays les plus riches et les plus puissants ont déjà de l’avance dans le domaine. Mais rares sont celles à avoir dépassé le cadre de la réflexion stratégique. Parmi les États précurseurs, l’Iris cite l’Australie, la Nouvelle-Zélande, le Royaume-Uni et les États-Unis. Ils ont mis en oeuvre des méthodologies d’évaluation de vulnérabilité, ont créé des comités spécifiques et soutiennent la recherche ou la production de manuels et de rapports sur ce thème. Ils se focalisent en général sur la résilience des infrastructures (bases, aéroports, ports, etc.) et sur l’adaptation des entraînements à des conditions climatiques extrêmes. Sur ce point, les États-Unis sont en pointe.
Les armées se préparent aussi à être beaucoup plus sollicitées par les autorités civiles pour participer à des opérations de secours et d’assistance à des populations sinistrées, à l’intérieur de leurs frontières mais aussi à l’étranger. Deux tendances se distinguent dans le cadre des missions de sécurité civile sur le territoire national. Certains gouvernements (Australie, Norvège, Nouvelle-Zélande) optent pour une coopération renforcée entre civils et militaires. D’autres favorisent l’implication directe des forces armées dans leurs systèmes d’anticipation des catastrophes naturelles (Japon, Chili, États-Unis).
Empreinte écologique
Les militaires réfléchissent aussi à réduire leur empreinte environnementale, et pas seulement par souci écologique. Ils mettent particulièrement en avant le concept de résilience énergétique, qui doit permettre d’identifier et de réduire les faiblesses dans la chaîne d’approvisionnement en énergie qui peuvent mettre à mal la tenue d’opérations armées. Les commandements cherchent donc à s’affranchir au maximum des énergies fossiles difficiles à acheminer. Ils misent de plus en plus sur les énergies renouvelables plus autonomes et décentralisées pour alimenter des bases avancées, et souhaitent améliorer l’efficacité énergétique de leurs équipements et de leurs véhicules.
Enfin, certaines forces armées mènent des initiatives afin de minimiser leurs impacts environnementaux. Le département de la Défense des États-Unis travaille sur deux programmes de recherche, spécialisés dans le développement de technologies militaires moins polluantes. D’autres participent activement à la restauration et à la protection d’écosystèmes : les militaires chinois et jordaniens participent par exemple à des opérations de plantation d’arbres, tandis que les brésiliens protègent la forêt amazonienne de coupes illégales.
* Iris, rapport d’étude n°15 : Intégration des enjeux climato-environnementaux par les forces armées