MPEB : mesurer pour mieux économiser

05 05 2021
Olivier Mary
DR

Très souvent, lorsque des bâtiments sont construits ou rénovés, les gains acteurs de la filière, garantir la qualité énergétiques sont inférieurs aux prévisions. La Mesure de performance des bâtiments (MPEB) commence à être instrumentée afin de mieux interpréter les consommations des constructions et rectifier les anomalies.

Dans le cadre du Programme de recherche et d’expérimentation sur l’énergie dans le bâtiment (Prebat), 166 bâtiments ont été suivis de manière approfondie. Cette initiative a montré des écarts parfois très importants entre la performance énergétique attendue avant travaux et celle réellement mesurée sur place. Ces écarts ont atteint entre 2 et 70 % selon les constructions. Dans la quasi-totalité des cas, la consommation était supérieure aux prévisions. De nombreux facteurs expliquent ces divergences. Tout d’abord, lors de la phase de conception, les hypothèses retenues, concernant l’occupation ou l’utilisation des locaux, peuvent ne pas correspondre à la réalité. Ensuite, lors de la construction, des malfaçons peuvent survenir, faussant à coup sûr les chiffres. Enfin, lorsque le bâtiment est exploité, la qualité de la gestion des équipements techniques ainsi que le comportement par définition assez imprévisible des occupants, peuvent dégrader la performance attendue.
La Mesure de performance énergétique des bâtiment (MPEB) apparaît donc importante pour mieux connaître, comprendre et interpréter
les consommations énergétiques des bâtiments ainsi que la performance des enveloppes et des équipements. Avec l’émergence du numérique, l’accès à ces nouvelles techniques est facilité. « Ces outils doivent crédibiliser les objectifs de performance, donner confiance au marché en sécurisant les acteurs de la filière, garantir la qualité des travaux et augmenter les compétences des professionnels », explique Stéphanie Derouineau, cheffe de division de la direction énergie environnement du Centre scientifique et technique du bâtiment (CSTB), qui a animé l’atelier sur la MPEB pour la Fondation bâtiment-énergie.

Des méthodes diverses

Si la MPEB existe déjà, les pratiques demeurent encore très hétérogènes. Concrètement, il s’agit de caractériser la performance énergétique des bâtiments en s’appuyant sur des mesures. Mais la consommation d’énergie dépend de conditions difficilement prévisibles comme la météorologie à moyen terme, le taux d’occupation ou la température de consigne de chauffage. Pour former un indicateur de performance énergétique (IPE), qui quantifie la performance globale d’un bâtiment, un calcul est réalisé pour neutraliser l’impact des variations de ces paramètres. Ces calculs, baptisés opérations d’ajustement, reposent sur la modélisation. Celle-ci peut utiliser de la statistique, de la physique ou un mélange des deux. Elle a pour vocation d’estimer ce que le bâtiment aurait consommé dans des conditions données, choisies pour le projet. « Prendre en compte l’incertitude permet de prendre des décisions éclairées et de mieux gérer les risques. On parlera alors d’une consommation de 150 MW/m²/an avec un seuil d’erreur de plus ou moins 20 MW/m²/an », précise Constance Lancelle, ingénieure au Cerema. La MPEB est aussi possible à l’échelle d’un sous-ensemble tel que l’enveloppe. Elle mesure alors deux caractéristiques thermiques : la perméabilité à l’air et le niveau d’isolation thermique (dans son ensemble ou à l’échelle d’une paroi). Les mesures réalisées à l’aide de capteurs peuvent durer quelques jours ou plusieurs mois sur une saison de chauffe. Des méthodes sont aussi disponibles pour évaluer les performances des systèmes énergétiques (chauffage, ventilation, refroidissement, etc.). Ils peuvent être testés en laboratoire ou sur sites. Les résultats en laboratoire reflètent néanmoins rarement une performance réelle, il est donc préférable de réaliser les mesures en phase d’exploitation. Pourtant, celles-ci restent rarement menées en dehors de périodes de révision ou de dysfonctionnement. La faute à un coût trop élevé. En effet, si les calculs sont automatisables, l’analyse et le suivi demandent du temps et l’expertise. Et cela coute plus d’argent que la simple pose de capteurs.

Un coût encore à optimiser

Comme pour toute technologie émergente, le coût de la MPEB reste donc élevé mais varie beaucoup selon la maturité de la méthode de mesure employée. Il est forcément important lorsque celle-ci est en phase de développement des méthodes, alors qu’il diminue lorsque la solution est industrialisée à grande échelle. À titre d’exemple, la mesure de perméabilité à l’air s’est aujourd’hui démocratisée. Son coût s’est donc considérablement réduit depuis le début des années 2000. Pour les services émergeants, les coûts baisseront si des réglementations incitatives ou obligatoires sont prises par les pouvoirs publics et stimulent la demande. Toutefois, selon ses promoteurs, la MPEB a plus de bénéfices que de coûts. « Les bénéfices sont très importants car la consommation d’énergie est ensuite mieux maitrisée. Le gain reste limité pour les maisons individuelles mais il est plus important sur les bâtiments tertiaires. Le patrimoine prend de la valeur, le confort thermique est supérieur et la productivité des occupants dans les bureaux est meilleure », estime Frédéric Bougrain, chercheur à la direction économie et sciences humaines du CSTB.

Des immeubles déjà instrumentés

Pour réhabiliter le quartier de la Croix Berthaud à Saint-Chamond (Loire), le bailleur social Gier Pilat Habitat s’est orienté vers un contrat de performance énergétique (CPE) avec pour objectif de réduire de 50% les consommations et d’améliorer le confort des locataires. La MPEB a été utilisée pour vérifier l’atteinte des objectifs. « Nous avons défini un plan de comptage type pour nous permettre d’identifier une source de dérive de consommation potentielle », rapporte Sébastien Friedrichs, directeur général du bureau d’études SF2E. Un système de gestion technique centralisée (GTC) a été installé avec de nombreuses sondes afin de piloter les équipements. Grâce à des sondes permanentes, des mesures de températures ont été menées dans 20% des logements, à différents étages. Toutes les données ont été remontées via une plateforme permettant de suivre en temps réel les consommations et le pilotage des équipements et ainsi d’identifier des problèmes de surconsommation. Pour pouvoir les rectifier rapidement. Sur ce chantier, le coût de la mesure a été au final relativement faible par rapport au montant des travaux, représentant moins de 0,5 % du total.

Une copropriété rénovée récemment à Stains (Seine-Saint-Denis), a aussi bénéficié de l’apport de la MPEB. Les travaux finalisés en décembre 2017, portaient sur la chaufferie gaz. Des mesures pour vérifier l’impact de ces travaux d’isolation sur les consommations ont débuté en été 2020 et dureront jusqu’à l’été 2021. Des appareils de mesure ont été installés dans la chaufferie pour évaluer les consommations liées à la production d’eau chaude sanitaire. Des capteurs de température ont aussi été implantés dans douze appartements afin d’étudier les comportements des résidents et mieux anticiper les consommations à venir. Pour l’instant, les relevés mensuels de consommation de gaz indiquent que les travaux de rénovation ont permis un gain de 35 à 40 % pour des températures intérieures autour de 21 °C. Sachant que le rapport de l’étude thermique estimait une économie de 58 % pour une consigne à 19 °C, les résultats sont plutôt satisfaisants. À l’avenir, ces mesures pourraient se banaliser si l’offre de solutions s’élargit, entrainant dans son sillage une baisse des coûts.

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