Une piscine mieux chauffée sans bourse délier

08 11 2021
Caroline Kim-Morange
Hellio-GEOPLC

Comment économiser en même temps de l’eau et de l’énergie dans une piscine ? L’une des pistes est de récupérer la chaleur des eaux de renouvellement des bassins. C’est ce qu’a fait l’Agglomération du bassin de Bourg-en-Bresse dans son centre aquatique, sans débourser un centime grâce aux certificats d’économie d’énergie.

La mise en place d’une récupération de chaleur sur les eaux du centre aquatique de Grand Bourg Agglomération, l’agglomération du bassin de Bourg-en-Bresse, s’est faite en deux temps. En 2014, un premier échangeur de chaleur du fabricant Onsen a été installé. À l’été 2020, « un nouveau système d’Onsen a été mis en route, plus performant dans la récupération des calories et doté d’une intelligence qui automatise et optimise notre fonctionnement », explique Damien Ribeyron, responsable de la direction du développement sportif de Grand Bourg Agglomération.

Flux inversés

La réglementation impose en effet de renouveler chaque jour au moins 30 litres d’eau par baigneur et par bassin. La solution d’Onsen combine l’outil de pilotage Hippocampe et le système de récupérateur d’énergie Degrés Bleus du fabricant, pour assurer un renouvellement d’eau automatisé. À Bourg-en-Bresse, la seule opération manuelle reste, chaque soir, la transmission du nombre de baigneurs du jour au système. À partir de ces chiffres, automatiquement, les électrovannes soutirent un minimum de 30 litres par baigneur et les conduisent jusqu’à un échangeur de chaleur. En passant dans ce dernier, l’eau issue des bassins préchauffe l’eau froide venue du réseau. Les calories manquantes pour atteindre la température voulue seront fournies par la chaudière à gaz du centre aquatique. Enfin, cette eau « propre préchauffée » est injectée dans les bassins pour compenser l’eau soutirée: le remplissage se fait en flux inversés.

350 MWh/an économisés

« Les débits d’échanges de calories sont régulés entre 1 à 4 m3/h : ainsi, nous optimisons le taux de préchauffage de l’eau du réseau », signale Thibaud Perret, responsable projet à Onsen. Un taux qui peut atteindre les 91,6 % d’efficience d’après l’organisme Cetiat. Selon lui, « le système traite 50 à 70 % du renouvellement d’eau. Le reste est perdu en raison de l’évaporation et des éclaboussures, et il ne peut donc pas y avoir récupération de chaleur dessus ». Ce volume « perdu » doit être compensé par une eau du réseau chauffée par la chaudière à gaz. Grâce à la récupération de chaleur, les économies d’énergie s’élèveraient à 350 MWh par an entre la situation d’avant 2014 et aujourd’hui, soit une baisse de près de 13 % de la consommation d’énergie primaire dédiée au chauffage des bassins. Le gain apporté par le passage de l’ancien récupérateur de chaleur au nouveau n’apparaît quant à lui pas encore clairement dans les chiffres réels : la comparaison est rendue impossible par les chamboulements entraînés dans la fréquentation par le Covid.

De 100 à 50 litres par jour

Par contre, l’exploitant ressent nettement la différence en ce qui concerne la consommation d’eau. « Avant, nous changions 100 à 110 litres d’eau par jour et par baigneur, notamment pour laver nos filtres. Désormais, nous sommes entre 50 et 60 litres », se réjouit Damien Ribeyron. « Dans beaucoup de piscines, le soutirage de l’eau réglementaire est fait au jugé. Avec notre système, nous pouvons mieux réguler », indique Thibaud Perret. Par ailleurs, « une cuve de plusieurs dizaines de mètres cubes stocke une partie de l’eau issue des bassins après l’échange de chaleur. Cette eau refroidie a une troisième vie. Après avoir servi à la baignade et avoir livré ses calories, elle est utilisée pour laver les filtres », décrit Thibaud Perret. Concrètement, si l’on compare 2014 et aujourd’hui, « près de 10 000 m3 d’eau en moins sont consommés par l’équipement chaque année sur les 40 000 m3 habituels. C’est beaucoup plus performant », poursuit Damien Ribeyron.

CEE et CPE

La collectivité bénéficie aussi de l’intelligence du logiciel Hippocampe qui, outre le pilotage du récupérateur, assure la supervision et la télégestion énergétique. Les techniciens et les élus peuvent surveiller à distance les consommations d’eau, l’énergie consommée sur diverses échelles de temps, etc. Le système peut créer des alertes. « C’est un gros confort pour les techniciens », indique Thibaud Perret, qui reconnaît aussi que, dans le cadre du contrat de performance énergétique (CPE), le système leur permet aussi d’être prévenus en cas de dérive. La performance du nouvel équipement a permis de valoriser l’opération en certificat d’économie d’énergie (CEE) suivant la fiche d’opération standardisée « Récupération instantanée de chaleur sur les eaux grises » des bâtiments tertiaires (BAT-TH-154). Le délégataire est la société Hellio, qui a reçu dans l’opération deux mandats. L’un de la part d’Onsen, pour l’accompagner dans la partie financière et dans la rédaction d’un CPE. « Grâce à lui, nous avons pu obtenir la bonification de la prime CEE. Pour cela, le CPE a été conclu pour cinq ans et il garantit sur cette durée une économie d’énergie d’au moins 20 % », précise Ulysse Bossuet, responsable développement grands comptes chez Hellio. L’autre mandat lui a été confié par la collectivité, afin d’optimiser le gisement d’économie d’énergie et de constituer le dossier CEE.

Allers-retours

Concrètement, monter le dossier CEE et rédiger le CPE a exigé de fournir un certain nombre de preuves attestant des fréquentations de la piscine, des données d’exploitation, de l’efficacité énergétique du système mis en place. Pour fixer les objectifs du CPE, il a fallu qu’Onsen et le bureau d’études d’Hellio, GEO Énergie & Services, travaillent sur les données d’exploitation et sur le fonctionnement du site. « Avant qu’Onsen s’engage, nous avons fait plusieurs allers-retours avec le centre aquatique afin d’observer au plus près la réalité. C’est indispensable car aucun site ne se ressemble : quel est le nombre et volume des bassins, son mode de chauffage, les débits de filtration, la nature des équipements techniques, etc. » indique Ulysse Bossuet.

Opération clés en mains

De nombreux échanges ont donc eu lieu entre la collectivité, Onsen et GEO Énergie & Services. Cela a permis de réfléchir aux meilleurs leviers à mobiliser pour économiser l’eau et l’énergie. Mais aussi de construire en toute confiance le CPE. La collectivité, quant à elle, a pu bénéficier de cette opération clés en mains, sans avoir à monter le dossier, puisqu’il a été élaboré par Hellio. « Nous avons fourni des documents, des historiques, mais comme en interne nos tableaux de bord sont bien référencés, nous avons pu répondre à la demande sans difficulté », note Damien Ribeyron.
En outre, Grand Bourg Agglomération n’a rien dû débourser pour cet investissement dont le montant s’élevait pourtant à 70000 euros. « Nous avons conventionné pour que toute l’enveloppe récupérée par les CEE soit appliquée en remise sur l’opération. Sans le CPE il y aurait eu un reste à charge. Les CEE auraient financé le projet à hauteur de 40 000 ou 50 000 euros. Mais avec le CPE et la bonification qu’il apporte, nous avons couvert la totalité de la somme », relate Ulysse Bossuet. Évidemment, « cela a été un levier important pour convaincre les élus », admet Damien Ribeyron. « Travailler sur les centres aquatiques donne lieu à des opérations longues, techniques mais aussi passionnantes », conclut Ulysse Bossuet.

Aller plus loin ?
Grand Bourg Agglomération réfléchit désormais à d’autres améliorations possibles sur ses centres aquatiques. Installer le système Degrés Bleus ou simplement des variateurs de vitesse sur les pompes de soutirage des autres piscines qu’elle gère ; améliorer la performance du traitement de l’air… D’ores et déjà, l’équipe technique de la collectivité travaille avec la société Purecontrol, qui propose un système complémentaire de pilotage des consignes d’exploitation.

 

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