Réviser les situations de référence et les ambitions
Afin d’améliorer l’efficacité du dispositif des CEE et limiter les dérives, un travail de révision des fiches d’opérations standardisées est régulièrement réalisé. Dans le cas de l’arrivée de la 5e période, le ministère de la Transition écologique s’est en plus engagé à réviser les six fiches qui produisent les plus gros volumes de CEE.
Ces dernières années, plusieurs rapports ont mis en avant la surestimation de l’impact énergétique des opérations du dispositif des certificats d’économie d’énergie (CEE). Selon l’étude « Évaluation du dispositif des CEE » pilotée par Burgeap pour l’Ademe, « seulement 46 % d’économies réelles seraient imputables au dispositif (tous secteurs confondus) ». Ce manque de pertinence du dispositif en terme d’économies d’énergie réalisées serait principalement dû à la surestimation des forfaits des fiches standardisées CEE. Celle-ci « ne vient pas seulement dégrader l’impact énergétique du dispositif. Elle augmente le coût économique du dispositif par kWh économisé. […] Elle va alors conduire les acteurs à cibler les fiches les plus surévaluées (i.e., produisant plus de CEE) au détriment de la minimisation des coûts de l’efficacité énergétique », décrypte Mathieu Glachant de Mines ParisTech – PSL dans une analyse économique et économétrique du dispositif des CEE publiée en octobre 2020.
Réduire les écarts constatés
Pour renforcer l’efficacité des opérations CEE, un travail de révision de fiches est entrepris à chaque arrêté, par le Club C2E pour le compte de la Direction générale de l’énergie et du climat (DGEC). Ce travail a pour but de dépoussiérer des textes qui commencent à être obsolètes, et surtout à réduire les écarts constatés entre les forfaits de certaines fiches et les économies réelles mesurées sur le terrain. Réduire cet écart nécessite ainsi de revoir les situations de référence et/ ou les ambitions visées. « Certaines fiches datent encore du 14e arrêté, et évidemment les situations de référence ont évolué car les technologies et les équipements sont de plus en plus performants », appuie Julie Pisano, chargée de mission CEE à l’ATEE. Si les références sont révisées et l’ambition n’augmente pas, « le forfait va alors diminuer et ne sera possiblement pas assez incitatif pour le bénéficiaire, d’où l’importance de rehausser les ambitions », précise-t-elle.
Six fiches principalement ciblées
Pour ce 39e arrêté qui devrait paraître d’ici la fin de l’année, plusieurs fiches d’opérations standardisées sont en cours de révision comme l’AGRI-SE-101 « Contrôle et préconisation de réglage du moteur d’un tracteur» ou la BAT-EQ-117 « Installation frigorifique utilisant du CO2 subcritique ou transcritique». Un travail est également mené sur plusieurs fiches Transport (covoiturage, vélo à assistance électrique, acquisition de locomotive), tandis qu’une réflexion sur les fiches moteurs a été engagée afin de prendre en compte la nouvelle réglementation éco-conception. En outre, suite aux conclusions de l’évaluation du dispositif par l’Ademe et en prévision de l’arrivée de la 5e période, la DGEC s’était engagée à réviser les six fiches qui produisent les plus gros volumes.
En premier lieu, la fiche IND-UT-117 « Système de récupération de chaleur sur un groupe de production de froid » qui représente près de 20% du volume des CEE délivrés. Pour cette fiche, « les conditions d’application ont été renforcées afin de mieux encadrer son utilisation et éviter des pratiques peu vertueuses qui consistent à surdimensionner les groupes de production de froid pour obtenir un forfait plus important », indique Julie Pisano. Autre concernée, la fiche Luminaire BAR-EQ-111 dont la dernière révision date de 2017 et qui nécessite un rafraichissement pour intégrer le nouvel étiquetage énergétique et rehausser les exigences en raison de la domination du marché par les LED.
Enfin, pour la révision des quatre fiches IsolationBAR-EN-101 « Isolation de combles et de toitures », BAR-EN-103 « Isolation d’un plancher », BAR-TH-160 « Isolation d’un réseau hydraulique de chauffage ou d’ECS » et BAR-EN-102 « Isolation des murs » les plus utilisées, la DGEC a commandé une étude à Pouget Consultants afin de réduire les écarts recensés entre les fiches et le terrain. Toutefois les troncatures de forfaits proposées – certaines peuvent atteindre les 60% - inquiètent forcément la filière. « Tout un marché s’est créé autour de ces fiches donc la filière risque d’être impactée par une baisse des forfaits mais tout dépendra des critères visés et de l’ambition que souhaite avoir le ministère. Pour l’instant, la DGEC se garde le temps de statuer », conclut la chargée de mission CEE.