Le village des athlètes mise sur le bois et la géothermie

04 10 2021
Olivier Mary
Solidéo
Une fois la compétition terminée, le village des athlètes sera reconverti en un véritable quartier qui s’étendra sur les trois communes de Saint-Denis, Saint-Ouen et L’Île Saint-Denis.

Le village des athlètes, qui accueillera en Seine-Saint-Denis les sportifs lors des Jeux olympiques de Paris 2024, se veut exemplaire du point de vue environnemental. Ses bâtiments intègreront de nombreux éléments en bois et l’ensemble du nouveau quartier sera relié à un réseau de chaleur et de froid déjà présent à proximité.

« Nous nous engageons à organiser des Jeux Olympiques et Paralympiques d’une nouvelle ère ; des Jeux qui contribuent à leur niveau à la transformation écologique de la société ». Dans leurs engagements, les acteurs de Paris 2024 ont mis dès le départ l’accent sur leur volonté d’organiser une manifestation la plus écologique possible. « Au total, Paris 2024 réduira les émissions de CO2 liées à l’évènement de 50 % comparé aux éditions antérieures des Jeux », a annoncé le comité d’organisation. En outre, il s’engage à compenser toutes les émissions qui ne peuvent être évitées en soutenant des projets de prévention et de capture de CO2 et à encourager ses partenaires commerciaux et ses fournisseurs à appliquer des critères de durabilité et de neutralité carbone à leurs achats pour les Jeux. Enfin, les organisateurs souhaitent ériger des bâtiments exemplaires du point de vue environnemental.

À ce titre, le village olympique en cours de construction à cheval sur les villes de Saint-Ouen, Saint-Denis et L’Île-Saint-Denis donnera une grande place aux matériaux biosourcés et sera raccordé à un réseau de chaleur et de froid majoritairement alimenté par la géothermie. Situé à environ cinq minutes du Stade de France, il pourra accueillir environ 14 000 athlètes et leurs accompagnants sur 51 hectares. Il nécessitera un investissement total de plus de trois milliards d’euros.

L’accent mis sur le bois

Les constructions, qui atteindront une surface totale de 260 000 m², intégreront en moyenne 50 % de bois dans leurs structures. Au départ, c’est une part de 80 % qui était prévue. Mais compte tenu des délais très serrés à tenir - les locaux seront occupés dès le printemps 2024 l’ambition a été revue à la baisse. Le cahier des charges de la Société de livraison des ouvrages olympiques (Solideo) impose des ossatures en bois pour les immeubles de moins de 28 mètres de haut, mais pour les projets plus élevés, la seule règle est de favoriser les ciments alternatifs. En effet, intégrer du bois dans ces bâtiments nécessite d’obtenir des autorisations techniques supplémentaires qui rallongeraient les délais. Ce sont donc surtout les immeubles les plus bas qui utiliseront ce matériau. « L’ossature bois est une technique non traditionnelle dès que l’on commence à monter à des hauteurs élevées. Nous avons notamment dû démontrer sa compatibilité avec les déformations induites par le gros œuvre », précise Pascal Gontier, architecte sur le lot D situé à Saint-Ouen (1).

Solidéo
En tout, 21 500 m3 de bois seront utilisés dans la construction du village olympique qui a débuté en juillet 2021.

BBCA, HQE, E+C- et Biodivercity

La société dédiée à l’ingénierie de la construction Egis, filiale à 75% de la Caisse des Dépôts, a aussi travaillé sur un lot dans cette ville. « Il est conçu sur un socle commun en béton qui relie les différents bâtiments. Pour le reste, l’ensemble des structures sont en bois », explique François Consigny, président d’Elioth, entité du groupe Egis. Le bardage des façades a été réalisé en terre cuite ou en enduit en fonction de l’exposition. Les bâtiments ont de grands balcons et bénéficient de volets ouvrants munis de persiennes. En outre, les espaces de circulation profitent de la lumière naturelle afin de baisser les consommations électriques. Les bâtiments de ce lot seront notamment labellisés BBCA, HQE, E+C- et Biodivercity. Selon le cahier des charges établi par Solidéo, les bâtiments ne devront pas émettre plus de 740 kg CO2/m²SDP. Le bois a été privilégié car il permet d’atteindre plus facilement les objectifs fixés par les organisateurs des JO : diminution de 40 % de l’impact carbone des bâtiments, recyclage de 50 % des matériaux utilisés, résistance aux dérèglements climatiques, etc.

Ré-emploi et recyclage

En tout, 21 500 m3 de bois seront utilisés dans la construction du village olympique. Il sera issu à plus de 50% de forêts françaises et transformé en France, en circuits courts. 100 % du bois mis en œuvre proviendra de forêts gérées durablement. S’il est utilisé massivement sur ce chantier, c’est aussi car il est bien adapté aux exigences de la phase de réaménagement et de déconstruction qui se déroulera après les jeux olympiques.
En effet, une fois la compétition terminée, le village des athlètes devra être reconverti et sera investi par 6 000 résidents. C’est un véritable quartier avec environ 2 000 logements familiaux, des résidences pour étudiants, des groupes scolaires, des équipements sportifs, des commerces et des bureaux qui s’étendra alors sur les trois communes de Seine-Saint-Denis. Les promoteurs devront réemployer et/ou recycler le plus possible les équipements provisoires installés pour la compétition (cloisons, salles de bains préfabriquées, revêtements de sols). Sur les bâtiments dont il a la charge, le groupe Vinci Immobilier vise par exemple un taux de réemploi-recyclage de 75%. Le futur quartier sera aussi végétalisé pour atténuer les effets des îlots de chaleur urbains et anticiper les changements climatiques : 20% de sa surface sera plantée. Une pépinière de plantes sauvages, des terrasses et toitures végétalisées ou un jardin partagé devraient voir le jour.

Le quartier relié au réseau du Smirec

Pour ses besoins en chaleur et en froid, le futur ensemble sera raccordé au réseau du Syndicat mixte des réseaux d’énergie calorifique (Smirec) qui alimente déjà 54000 logements dans les communes de Pierrefitte, Stains, La Courneuve, Aubervilliers, Saint-Denis et L’Île-Saint-Denis. Une convention tripartite a été signée en juin 2020 par la Solideo, le Smirec et Engie Solutions pour mener à bien ce projet. Les calories sont actuellement générés par trois chaufferies gaz, deux mixtes bois et gaz, deux centrales géothermiques et une brûlant du biogaz. Elles sont transportées vers les utilisateurs via 90 kilomètres de canalisation. 420 GWh sont à ce jour livrés aux abonnés chaque année.

Onze nouveaux puits géothermiques

Géré par Plaine Commune Énergie, filiale à 100 % d’Engie Solutions, ce réseau sera donc étendu au village des athlètes ainsi qu’à la future ZAC Pleyel (2). Onze nouveaux puits géothermiques vont y être forés et dix kilomètres de canalisation supplémentaires y seront enterrés. Trois puits seront dédiés au captage. Ils extrairont l’eau d’une nappe située entre 50 et 60 mètres de profondeur. L’eau prélevée, d’une température de 14°C, sera ensuite acheminée vers une centrale géothermique. L’installation, dont les travaux ont débuté il y a moins d’un an, produira en simultané du chaud et du froid grâce à l’installation de groupes thermo-frigo-pompes. L’eau géothermale sera ensuite réintroduite dans Aquifère lutétien grâce huit puits injecteurs. Si les forages sont en cours, la construction du bâti ne débutera pas avant l’année prochaine et la mise en service devrait intervenir en 2023. Cet équipement permettra aux bâtiments de bénéficier d’une énergie à 68 % renouvelable. Il nécessite un investissement de 18 millions d’euros dont 5,8 M€ subventionnés par la Région Île-de-France, l’Ademe Île-de-France et la Solidéo.
 

(1) Les propos de Pascal Gontier et François Consigny ont été recueillis lors d’EnerJ-meeting, qui s’est tenu le 7 septembre à Paris.
(2) La ZAC Pleyel est une opération publique de 17 hectares située de part et d’autre de la future gare du Grand Paris Express « Saint-Denis Pleyel ». 300 000 m² de programmes immobiliers seront livrés entre 2022 et 2028.

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