Grasse : les parfumeurs se lancent dans les gaz verts
Un consortium d’acteurs dans lequel figure Prodarom, le syndicat des parfumeurs, a lancé une étude destinée à estimer la viabilité technico-économique de la transformation en biogaz des drêches et des effluents de cette industrie basée autour de Grasse. Il projette ensuite de l’autoconsommer.
Le secteur de l’industrie est responsable d’environ 20 % des émissions de gaz à effet de serre (GES) et représente 35 % du gaz naturel consommé en France. Pour accélérer l’émergence de zones industrielles bas carbone (Zibac), GRDF a sélectionné sept projets territoriaux jugés « innovants ». Le distributeur de gaz financera une partie de leurs études de faisabilité, avec une enveloppe globale de 500 000 euros. L’un d’eux est porté par un consortium alliant le Syndicat national des fabricants de produits aromatiques (Prodarom), la Chambre de commerce et d’industrie (CCI) Nice Côte d’Azur, la société d’économie mixte (Sem) du département Green energy 06 et GRDF. Ces quatre acteurs comptent définir le mix de production de biogaz le plus approprié pour valoriser les coproduits de l’industrie du parfum grassoise : quelle proportion par la méthanisation ? Et par la gazéification hydrothermale ?
Co-construire des solutions
L’entreprise de distribution de gaz a sélectionné les sept lauréats de cet appel à projets (AAP) en suivant plusieurs critères, notamment le niveau de synergie et de co-construction entre les différents acteurs d’un même territoire (collectivités, industriels, producteurs d’énergie, etc.) ainsi que l’innovation. « D’une part, nous cherchions des projets de décarbonation de l’industrie qui valorisent les atouts du territoire tout en mutualisant l’usage des infrastructures énergétiques. D’autre part, les solutions proposées devaient s’appuyer sur les gaz verts, l’hydrogène ou le CO2. Le développement de schémas d’autoconsommation collective de biométhane ou encore de nouvelles démarches de flexibilité territoriale ont également été ciblés par cet AAP », étaye Sami Ghardaddou, chef de projet de la direction Stratégie de GDRF. D’autres AAP de ce type pourraient être lancés en 2024.
Pour Prodarom, la réflexion a débuté voici sept ans. Le Syndicat s’était renseigné afin de transformer les résidus issus de l’extraction ou de la distillation des plantes aromatiques, les drêches, de la cinquantaine de parfumeurs présents dans le département en biométhane. Selon une étude menée par le laboratoire de l’Institut national de la recherche agronomique (Inrae) de Narbonne entre 2019 et 2022, ce gisement est de 2 000 à 3 000 tonnes. « Actuellement, elles sont compostées à Tarascon (Bouches-du-Rhône) à la limite de la région. Nous avons émis l’idée de réduire les transports par camion en les valorisant sur place grâce à la méthanisation, puis d’autoconsommer ce gaz vert grâce aux futurs avancées législatives. En étudiant leur caractérisation, nous nous sommes en effet rendus compte qu’elles disposaient d’un fort pouvoir méthanogène », relate Marie-Thérèse Costa, chargée d’études environnement pour Prodarom. Ce pouvoir méthanogène est en outre plus important en présence de résidus d’alcool, issus du procédé d’extraction. Pour rentabiliser l’installation, le consortium a dû élargir le gisement potentiel. Les effluents de lavage et de process des industriels ou encore les boues issues de stations d’épuration (Step) ont donc été ajoutés. Selon l’étude préliminaire au projet, 15 000 t de matière organique peuvent être valorisées, ce qui produirait 10 à 15 t de gaz renouvelable et éviterait l’émission annuelle de 1650 t de CO2.
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