Une transition marquée vers l'électrique et les EnR
Selon le dernier rapport de l’Agence internationale de l’énergie, des progrès notables ont été faits dans le secteur des sources renouvelables. Si les combustibles fossiles dominent encore, l’entrée dans l’ère électrique se rapproche grandement.
Comme chaque année, l’Agence internationale de l’énergie (AIE) nous livre son analyse et ses projections du monde de l’énergie. Avec son lot de nouvelles positives mais aussi les nombreux obstacles et freins à la transition énergétique encore recensés. En 2023, les énergies renouvelables se sont déployées à un rythme sans précédent, avec 560 GW de nouvelle puissance installée pour atteindre un total de 4 250 GW. Toujours en tête dans ce secteur, la Chine a représenté 60 % de la capacité renouvelable ajoutée l’an passé. « La production solaire photovoltaïque de la Chine devrait, d’ici le début des années 2030, dépasser la demande totale en électricité des États-Unis aujourd’hui », estime même l’AIE dans son rapport World Energy Outlook 2024 (WEO). Plus de la moitié de l’électricité de la planète sera en outre d’origine bas carbone d’ici la fin de la décennie, selon l’institution. Celle-ci confirme de nouveau que la demande pour les trois combustibles fossiles – charbon, pétrole et gaz – devrait encore atteindre son pic d’ici 2030. Une affirmation qui prend de nouveau le contrepied des industriels pétrogaziers, en particulier de l’Organisation des pays exportateurs de pétrole (Opep). « Dans l’histoire de l’énergie, nous avons été témoins de l’ère du charbon et de l’ère du pétrole – et nous entrons maintenant à toute vitesse dans l’ère de l’électricité, qui définira le futur système énergétique mondial de plus en plus basé sur des sources d’électricité propres », estime Fatih Birol, le directeur exécutif de l’AIE.
Investissements verts
Ainsi, les investissements dans les énergies renouvelables approchent les 2 000 milliards de dollars en 2023, soit une augmentation de 60 % en une petite décennie. Cela représente également le double du montant dépensé pour les combustibles fossiles : désormais, pour chaque dollar investi dans les énergies fossiles, deux le sont dans les sources vertes. « Avant la pandémie de Covid-19, ce ratio était plus proche de 1:1 », précise l’AIE. L’économie mondiale de l’énergie s’électrifie donc davantage. Depuis 2010, la demande d’électricité a augmenté en moyenne de 2,7 % par an, tandis que celle totale d’énergie a crû de 1,4 % par an.
L’électricité est de plus en plus utilisée à la place des combustibles fossiles pour répondre aux besoins de la mobilité et des industriels. « Les innovations telles que les réseaux intelligents et les avancées dans l’efficacité des moteurs électriques et des appareils ont également renforcé l’attrait de l’électricité », notent les auteurs du rapport. De nombreuses technologies d’énergie propre sont déjà matures, à l’image du solaire photovoltaïque et de l’éolien qui sont désormais les sources d’électricité les moins chères dans la plupart des marchés. « De plus, l’importance d’une approche systémique – y compris la nécessité d’élargir et de moderniser les réseaux électriques et d’accélérer l’adoption du stockage d’énergie et de la réponse à la demande – est de plus en plus reconnue comme essentielle pour réaliser les transitions les plus abordables et sécurisées », appuie l’AIE.
Un retard à combler
Malgré ces constats positifs en faveur des transitions, le monde est encore loin d’être sur une trajectoire alignée avec ses objectifs climatiques. « Les décisions des gouvernements, des investisseurs et des consommateurs renforcent trop souvent les défauts du système énergétique actuel, plutôt que de le pousser vers une voie plus propre et plus sûre », estime l’AIE. Un retard sur les engagements de la 28e Conférence des parties sur les changements climatiques (COP28) est également à craindre, notamment sur celui de triplement de la capacité installée des énergies renouvelables d’ici 2030. « L’objectif de doubler le taux mondial d’amélioration de l’efficacité énergétique pourrait permettre des réductions d’émissions plus importantes d’ici 2030 que toute autre mesure, mais semble bien hors de portée avec les politiques actuelles », insiste également le WEO.
Des efforts importants sont donc attendus, notamment en termes d’investissement de la part des économies émergentes. En effet, les pays avancés et la Chine représentent actuellement 85 % du total de l’investissement dans les énergies renouvelables, contre seulement 15 % pour les autres qui abritent pourtant les deux tiers de la population mondiale. Le coût élevé du capital et le manque de financement à long terme sont les principales raisons de ces déséquilibres régionaux. « Cette inadéquation est une préoccupation majeure, étant donné que la demande de services énergétiques dans les économies en développement augmentera inévitablement dans les années à venir pour soutenir l’élévation des niveaux de vie, l’accès universel à l’énergie et la construction d’infrastructures modernes », avertit l’AIE. Dans le cadre du scénario net zero emission, les flux financiers en faveur des énergies vertes devraient ainsi être multipliés par au moins 6,5 dans les pays en développement d’ici 2035, alors qu’ils ne feraient que doubler dans les économies avancées…