Le scénario idéal du photovoltaïque français

Des acteurs du solaire et de la protection de l’environnement se sont associés pour écrire le scénario idéal du développement photovoltaïque en France. Un idéal à concilier à court terme avec un contexte incertain.
Comment déployer massivement le photovoltaïque en France ? Dans un contexte inflationniste, marqué par le renchérissement des matières premières et la remontée des taux d’intérêt, 2 GW de projets seraient aujourd’hui menacés en France, selon le Syndicat des énergies renouvelables (Ser). Pour autant, « dans tous les scénarios menant à la neutralité carbone, il faut beaucoup de renouvelables », rappelle son président, Jean-Louis Bal. Dans ce contexte, plusieurs acteurs – Ser, Hespul, Fédération Nature Environnement (FNE) et le réseau Cler-Réseau pour la transition énergétique – ont présenté leur « scénario idéal » du développement du photovoltaïque en France. Leur point d’arrivée se situe en 2052. À cette date, « la France s’est beaucoup électrifiée mais sans forcément consommer plus, grâce aux efforts de sobriété », décrit Marc Jedliczka, directeur général de l’association Hespul et vice-président du Cler. L’électrification des usages dans la mobilité, le bâtiment et l’industrie aura doublé la part d’électricité dans la consommation d’énergie, pour atteindre 50%, mais la hausse restera modérée en valeur absolue, entre +15 % et +20 %.
Côté photovoltaïque, la capacité installée de 140 GW générerait 170 TWh, un tiers de l’électricité consommée en France. Le déploiement de cette capacité photovoltaïque s’accompagnerait d’une relocation de la fabrication des équipements et d’une gouvernance des projets impliquant les acteurs locaux. Ce scénario idéal, où l’approvisionnement est 100 % renouvelable, s’inscrit en réalité dans la lignée de celui de l’association négaWatt, dont Marc Jedliczka est par ailleurs porte-parole.
Volonté politique et planification spatiale
Comment situer cette cible « idéale » de 140 GW par rapport aux ambitions françaises actuelles ? Dans son discours prononcé à Belfort, lors de son précédent quinquennat, début 2022, « le président de la République avait fixé l’objectif de 100 GW de photovoltaïque en 2050 », compare Jean-Louis Bal. Même si cet objectif de 100 GW est conservé par le nouveau gouvernement, il reste très en deçà des attentes de la filière : « nos projections montrent que nous avons le potentiel de l’atteindre dès 2033 », interpelle le président du Ser. Ce qui supposerait de raccorder 8 GW par an, contre seulement 2,7 GW l’an dernier. Une telle accélération passerait avant tout, selon le Syndicat, par « une volonté politique affichée » et une hausse des moyens humains consacrés à l’instruction des projets. À très court terme toutefois – dès cet été – le Ser demande aussi des mesures d’urgence face à l’inflation. Par exemple, la possibilité pour les futurs projets de vendre l’énergie sur le marché avant l’activation de leur contrat.
Reste à déterminer où développer ces projets solaires en priorité. « Trop souvent, des parcs au sol sont installés dans des zones naturelles » en contradiction avec les enjeux de biodiversité », déplore notamment Michel Dubromel, référent énergie de FNE, qui demande une planification spatiale et temporelle plus fine, et une régionalisation des dispositifs de soutien pour rééquilibrer le développement des projets. « La moitié sud du pays reste privilégiée, mais là-bas aussi il y a des biotopes protégés. »
La France a-t-elle suffisamment d’espace ? « Aujourd’hui, la moitié de la surface utilisée par le photovoltaïque correspond probablement à des toitures de bâtiments, des parkings et des terrains dégradés », évalue Jean-Louis Bal. En gardant le même ratio, pour atteindre 100 GW, il faudrait disposer de 65 000 hectares de terres, poursuit-il. Une surface qu’il relativise au regard des 27 millions d’hectares de surface agricole utile en France.