Une croissance insuffisante pour les objectifs de 2030
Ces dernières années, les réseaux de chaleur et de froid ont connu une croissance proche de 10 % par an. Celle-ci est toutefois insuffisante pour atteindre les objectifs fixés à l’horizon 2030. Dans un rapport publié fin septembre, la Cour des comptes propose trois grandes orientations pour accroître les performances énergétiques et environnementales de ces infrastructures. Et surtout favoriser leur développement à plus grande échelle.
« Le mode de chauffage dit “urbain” ou “réseau de chaleur” est une contribution efficace à la transition énergétique qui reste insuffisamment exploitée ». Telle est la conclusion principale d’un rapport réalisé (en pdf à la fin de l'article) par la Cour des comptes avec la participation de neuf chambres régionales des comptes. Ce document cherche avant tout à analyser la manière dont l’État et les collectivités territoriales compétentes répondent aux problématiques de mise en oeuvre de l’objectif national de développement des réseaux de chaleur. Malheureusement, ce dernier risque de ne pas être atteint.
La loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte (LTECV) d’août 2015 fixait comme objectif, la multiplication par cinq de la quantité de chaleur et de froid renouvelable entre 2012 et 2030. À cette date, 3,4 millions de tonnes d’équivalent pétrole (Mtep) d’énergie renouvelable devraient être livrées par ces infrastructures. Si la consommation de chaleur renouvelable par les réseaux est passée de 0,68 à 1,21 Mtep entre 2012 et 2019, cette trajectoire reste insuffisante. À ce rythme de croissance d’environ 10 % par an, la chaleur renouvelable livrée en 2030 ne serait que de 2,26 Mtep, bien loin de l’ambition de la LTECV. Et ce, malgré un potentiel français estimé à 5,8 Mtep…
Collectivités en première ligne
Une des principales raisons de ce faible développement est le manque de planification de ces réseaux, à tous les échelons territoriaux. Les schémas régionaux climat air énergie (SRCAE) intégraient en effet peu cette problématique et l’élaboration des schémas régionaux d’aménagement, de développement durable et d’égalité des territoires (Sraddet) et des plans climat air énergie territoriaux (PCAET) a pris un certain retard. Enfin, les schémas directeurs des réseaux de chaleur que devaient réaliser les collectivités disposant d’un réseau, n’ont pas été le levier attendu.
De plus, « l’enquête a permis de relever plusieurs exemples où les contrôles des collectivités délégantes étaient lacunaires, en raison souvent de l’absence de ressources humaines ou techniques adaptées », souligne le rapport. La responsabilité n’incombe toutefois pas exclusivement aux collectivités. Celle de l’État serait également concernée. Les sages de la rue Cambron estimant que les « les aides au développement des réseaux de chaleur et de froid pourraient prendre d’autres formes que le recours à des financements publics ».
Trois orientations, huit recommandations
Pour augmenter le rythme de développement des réseaux de chaleur, la Cour des comptes a formulé trois orientations ventilées en huit recommandations. La première est de « accroître les performances énergétiques et environnementales des réseaux de chaleur », en conditionnant les aides du Fonds chaleur à la réalisation d’un diagnostic multi-énergies et en identifiant les réseaux concernés par les quotas d’émissions. Le rapport insiste également sur la nécessité de mieux prendre en considération les usagers de ce service public. Pour se faire, il propose différents moyens comme la généralisation de comités des usagers ou la réalisation d’un rapport annuel par le propriétaire du réseau sur le prix et la qualité du service public. La révision des règles de partage de l’amortissement des coûts de raccordement à un réseau de chaleur entre bailleurs et locataires est aussi avancée.
Enfin, la troisième orientation repose sur le besoin de rendre plus efficient l’organisation et le pilotage des réseaux de chaleur. Ainsi, « la compétence de création, d’aménagement, d’entretien et de gestion des réseaux de chaleur et de froid urbain devrait être transférée à tous les établissements publics de coopération intercommunale de plus de 20 000 habitants », précise le document. L’amélioration de la diffusion des données économiques sur les réseaux de chaleur aiderait également à un pilotage plus pertinent. Cela nécessitera de travailler sur un indicateur lisible et aisément applicable à l’ensemble des réseaux pour éviter les incompréhensions de lecture.