Le marché mondial des batteries en plein essor

17 02 2022
Clément Cygler
EDF

Pour parvenir à la neutralité carbone, le développement de nouvelles flexibilités, notamment les batteries, est une condition indispensable. L’apparition d’applications de stockage stationnaire et surtout l’attrait de plus en plus grand pour les véhicules électriques pourraient favoriser l’essor des batteries.

De nombreux pays – plus d’une cinquantaine – se sont lancés dans la course à la neutralité carbone. Pour l’emporter, un développement massif des énergies renouvelables est attendu ces prochaines décennies, en particulier le solaire photovoltaïque et l’éolien. Cette part croissante et conséquente d’énergie renouvelable, de nature intermittente, nécessitera le développement concomitant de nouvelles flexibilités pour assurer la stabilité des réseaux électriques. Plusieurs solutions d’ajustement et d’équilibre existent, telles que le pilotage de la consommation, le développement d’interconnexions et le recours à des dispositifs de stockage. Parmi ces derniers, on peut citer les stations de transfert d’énergie par pompage (Step) qui est la technologie actuellement dominante, le stockage par air comprimé, les volants d’inertie, le power-to-gas et bien sûr les batteries, qu’elles soient pour des applications stationnaires ou d’électromobilité.

Stockage stationnaire

Conscient de ces nouveaux besoins, le marché des batteries, dominé par les modèles lithium-ion, est désormais en pleine ébullition. Au niveau mondial, la capacité totale de stockage stationnaire par batterie est ainsi passée d’à peine 1 GW en 2015 à plus de 17 GW à la fin 2020. Près de 5 GW de capacité de stockage, soit 50 % de plus qu’en 2019, ont été ajoutés en 2020, avec en tête la Chine et les États-Unis. Ces deux pays enregistrent chacun des ajouts à l’ordre du gigawatt. Les installations à l’échelle des services publics continuent en outre de porter le marché, et représentent environ deux tiers de la capacité totale récemment ajoutée.

« Bien que les nouvelles politiques et les nouveaux projets sur les marchés clés doivent accélérer la croissance, une hausse encore plus rapide est nécessaire pour s'aligner sur le scénario de neutralité carbone d'ici à 2050. Il prévoit l'installation de près de 600 GW de capacité de stockage par batterie d'ici à 2030 », indique toutefois l’Agence internationale de l’énergie (AIE) dans le rapport de suivi « Energy Storage », publié en novembre dernier. En Europe, ce segment stationnaire reste encore balbutiant, même si certains pays, comme l’Allemagne et le Royaume-Uni, ont vu une forte expansion du stockage derrière le compteur pour des installations résidentielles.

En France, les principales sources de production (nucléaire et hydraulique) sont en grande majorité pilotables, limitant ainsi les besoins de stockage dans les dix années à venir. Des expérimentations rassemblant gestionnaires de réseaux, industriels, collectivités et chercheurs, ont quand même été lancées. La plus emblématique est le projet Ringo qui vise à créer des lignes virtuelles associées à des batteries de forte capacité pour décongestionner le réseau. Porté par RTE, ce concept de stockage/déstockage simultané combine trois sites de stockage disposant chacun de capacité comprise entre 10 et 12 MW. L’expérimentation consiste ainsi à tester l’insertion en exploitation de ces installations pendant trois ans afin de valider l’équilibrage multi-sites et l’utilisation de batterie de grande taille (faisabilité technique, performances…).

Mobilité électrique

Le marché des batteries est également dynamisé par l’électromobilité, elle-même favorisée par de nombreuses politiques publiques. Les ventes de batteries lithium-ion pour les véhicules ont par exemple triplé entre 2017 et 2020 pour atteindre les 143 GWh. Selon les données compilées par l’analyste automobile indépendant Matthias Schmidt pour le compte du Financial Time, une voiture neuve sur cinq immatriculée en Europe occidentale était un véhicule électrique à zéro émission en décembre 2021. Un chiffre supérieur à celui des voitures diesel pour ce même mois (19 % d’immatriculation). Au total, les voitures électriques atteignent une part de marché de 11,2 % en 2021 (1,19 million d’immatriculations recensées dans 18 pays européens), contre seulement 6,7 % un an auparavant.

Source BloombergDevant de tels volumes, il devient intéressant et pertinent de tirer profit du potentiel de flexibilité et de stockage diffus que représentent les véhicules électriques. Dans ce cas, la recharge devient bidirectionnelle et permet à la voiture de restituer une partie de l’électricité stockée dans ses batteries pour optimiser le fonctionnement du réseau et pallier le caractère intermittent des énergies renouvelables. Les premiers résultats d’expérimentation de vehicle- to-grid ont confirmé ce potentiel et ont même poussé RTE à certifier une solution mise au point par Dreev. Un autre facteur pourrait également favoriser l’essor du marché des batteries : la baisse des coûts de fabrication.

La mise à l’échelle de la production de batteries et l’apport de la R&D ont en effet permis une baisse générale de ce prix. Selon la dernière enquête du cabinet BloombergNEF, celui-ci est tombé à 132 dollars par kWh en 2021, contre 140 $/kWh observés en 2020, soit une baisse de 6 %. Le seuil symbolique des 100 $/kWh, fixé à 2024 par BloombergNEF, se rapproche petit à petit. Cependant, les tensions et les hausses des prix sur les matières premières pourraient retarder et même conduire de nouveau à une augmentation pour cette année. « En l’absence d’autres améliorations susceptibles d’atténuer cet impact, le moment où les prix passeront sous la barre des 100 $/kWh pourrait être repoussé de deux ans. Cela aurait un effet sur l’accessibilité des véhicules électriques ou sur les marges des fabricants, et pourrait nuire à l’économie des projets de stockage d’énergie », avertit le cabinet d’analyse.

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